Après avoir relu récemment Carmilla, le roman de Sheridan Le Fanu, curieuse, je me suis penchée sur les différentes adaptations. Et ai donc découvert que se joue dans ma ville jusqu’au 5 avril prochain une version théâtrale de l’histoire. Cette adaptation est jouée par deux actrices, Julia Huber dans le rôle de Laura et Léa Duquesne dans celui de Carmilla, avec un minimum d’accessoires. Courte (1 h 5) comme le roman, celle-ci se concentre sur la relation entre Carmilla et Laura en reléguant tous les personnages accessoires (père, gouvernantes, baron, etc.) à des voix désincarnées diffusées par haut-parleur. Et si la trame du livre est respectée, la conclusion en est différente : Laura de proie et victime deviendra peu à peu complice puis prédatrice, nous contant son histoire à la manière d’un Louis de la Pointe du Lac dans Entretien avec un vampire, la dépression et le peu d’estime de soi en moins. Certains éléments propres au mythe vampirique sont ainsi ajoutés (la non-réflexion dans le miroir, le soleil dangereux ou l’échange de sang) alors qu’ils ne figurent pas dans le texte d’origine. Mais ces choix scénaristiques ont l’avantage de clarifier l’histoire et de la rendre parlante pour tous les spectateurs, ayant lu Sheridan Le Fanu ou non.
Le jeu des actrices restitue parfaitement la non-humanité de Carmilla et ses sautes d’humeur d’un côté, et l’engouement et les inquiétudes de Laura de l’autre. La séduction et le jeu de chat et de souris qui s’établit entre les deux, mais également les réactions en miroir (Carmilla entendant les hymnes religieux, Laura sortant de son « cauchemar ») des deux personnages retranscrivent parfaitement la folie « gothique » du roman et sa sensualité, tout en assurant un spectacle accessible à tous. Il reste toutefois conseillé à partir de 12 ans en raison de son thème et de certaines scènes sanglantes.
Même si aucune tournée n’est prévue pour l’heure au-delà du 5 avril, je ne saurais que vous encourager à voir cette pièce.